Mille ans de mensonges
Depuis quelques mois, dans le contexte anxiogène des attentats perpétrés par l'État islamique, la théorie du complot s'immisce dans le cerveau des esprits les plus vulnérables, notamment les adolescents. Ces thèses complotistes tentent d'expliquer des événements troublants ou terrifiants. Avec cette question délirante : et si la vérité était ailleurs ? Le phénomène n'est pas nouveau. Il remonte même au Moyen Âge. Mais aujourd'hui, l'accroissement des flux d'information - comme Internet qui charrie indistinctement le vrai, le faux et le douteux - donne aux rumeurs les plus folles une dangereuse visibilité jusqu'ici inconnue. Pierre-André Taguieff, spécialiste du sujet, décrypte la construction et la diffusion de ces croyances.
QU'EST-CE QU'UNE THÉORIE DU COMPLOT ?
On entend ordinairement par « théories du complot » les explications naïves - ou supposées telles - qui mettent en scène un groupe ou plusieurs groupes agissant dans l'ombre ou en secret pour réaliser un projet de domination, d'exploitation, de corruption ou d'extermination. Les conspirateurs imaginés sont accusés d'être à l'origine d'événements négatifs, perturbateurs, troublants ou traumatisants dotés d'une signification sociale. Ces événements vont de la catastrophe naturelle, dénoncée comme non naturelle, à la mort accidentelle, jugée douteuse, d'un personnage célèbre, en passant par les épidémies, dont l'origine n'est pas identifiée clairement, les crises économiques, les guerres, les assassinats politiques, les révolutions sanglantes et les attentats terroristes. Les théories du complot s'opposent en général aux thèses officiellement soutenues par les autorités politiques ou les médias.