LE TABOU AFRICAIN
Le commerce triangulaire n'a pas enrichi que l'Europe. Il a fait aussi la fortune de royaumes négriers. Une vérité longtemps passée sous silence.
L'histoire de l'esclavage atlantique a été taboue de tous côtés : les descendants des esclavagistes n'en étaient pas fiers, les descendants d'esclaves non plus, et les Africains récusaient le fait que certains de leurs ancêtres avaient participé au trafic. En France, on glorifiait l'abolition de 1848, sans étudier la phase antérieure. Il a fallu la loi Taubira, en 2001, dénonçant l'esclavage comme crime contre l'humanité, pour mettre la question au programme. En 2000, celle-ci a été inscrite pour la première fois pour les enfants des îles anciennement esclavagistes : Martinique, Guadeloupe, La Réunion, Guyane. En Afrique, mis à part l'historien sénégalais Aboulaye Ly, qui soutint en 1955 une thèse sur la Compagnie du Sénégal au XVIIe siècle, le déni était le même. C'est en 2001 que l'historien sénégalais Ibrahima Thioub fit scandale, au Congrès international des historiens africains, à Bamako, en évoquant l'esclavage dans les sociétés sénégalaises.