La Révolution s'approprie les Lumières
Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les philosophes qui ont enfanté la Révolution, c'est la Révolution qui, après coup, s'est cherché une légitimité dans les textes fondateurs et les grands penseurs du XVIIIe siècle.
Dans Les Misérables , la petite silhouette de Gavroche tombant sur les barricades de 1832 est dans toutes les mémoires, comme les couplets impertinents dont il salue les gardes nationaux qui le tiennent en joue : «Je suis tombé par terre/C'est la faute à Voltaire/Le nez dans le ruisseau/C'est la faute à Rousseau.»
Le pied de nez du gamin de Paris à l'ordre militaire et bourgeois était un hommage aux deux grandes figures de la liberté qu'avaient incarné les plus célèbres philosophes du XVIIIe siècle. Détachés de leur contexte romanesque, ces vers symbolisent la responsabilité des Lumières dans le déclenchement de la Révolution de 1789 et, plus généralement, la place des intellectuels et l'influence des idées dans la vie politique française.