Goulags. La liesse et la peur à la mort de Staline
Aron Gabor, secrétaire général de la Croix-Rouge hongroise, est envoyé au goulag en 1946. Après sa libération et son départ pour l'Ouest, il témoigne dans un livre, découvert par l'historien Stéphane Courtois.
Un matin radieux. Le soleil de mars, habillé de rose, apparaît derrière la forêt. [...] Devant le portail du bagne, le thermomètre indique moins trente-deux degrés. Les brigades s'alignent en silence, lentement, mais l'air vibre, annonciateur d'une journée chargée de beaucoup d'imprévus. Les commandants, les gardes, les bagnards n'ont d'oreille que pour les haut-parleurs montés sur les poteaux. Ils attendent les rapports médicaux. Qui va sortir vainqueur : Staline ou la mort ? La voix vient du haut de la mairie et le gel décuple son intensité. Novossibirsk retransmet le combat de Staline contre la mort. Un long silence, les battements du coeur de Staline retentissent aux environs de Borzass. Après le rapport médical, le journaliste supplie Staline : "Notre père, notre bienfaiteur, n'abandonne pas ton peuple." Ces paroles de soumission sont accompagnées par les battements de coeur. De plus en plus vite, de plus en plus lentement.