DE LA PUISSANCE À LA DÉCHÉANCE
J'avais 14 ans en 1968 et j'étudiais au lycée Henri-IV, qui n'était pas encore cette machine à fabriquer des élites énarchiennes. Un lycée qui, certes, excluait une majorité d'enfants d'ouvriers et d'agriculteurs, comme dans tous les lycées de France - mais un lycée qui s'ouvrait largement aux rejetons des classes moyennes, à qui un vague bac littéraire suffisait pour être enrôlés sur le marché du travail. Un lycée où les affirmations identitaires n'étaient même pas imaginables dans les cours de récré. Un lycée 100 % blanc, mais aussi 0 % féminin, puisque la mixité demeurait proscrite dans l'Éducation nationale. Dans le Quartier latin, notre base arrière, l'un de nos principaux loisirs consistait à traîner des heures à la librairie Maspero...