Les retraites, une problématique qui dure depuis trois siècles
A la fin du XVIIème siècle, Colbert inaugure le premier système de pensions. Le début d’une longue série d’avancées et de réformes.
A quel âge les Français pourront-ils partir en retraite ? Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait pris l’engagement d’un seuil à 62 ans mais ce cap semble aujourd’hui remis en question, compte tenu de l’ampleur des difficultés économiques. Alors que les discussions se multiplient entre le gouvernement et les partenaires sociaux, l’histoire vient rappeler que l’histoire du système des retraites est régulièrement l’objet de grandes secousses.
S’il fallait trouver un père fondateur à ce mode de protection sociale, ce serait sans aucun doute Colbert. En septembre 1673, celui-ci institue une Caisse des Invalides de la marine royale, qui permet de porter assistance à ceux qui ne sont plus en état de servir. En 1709, les marins de la marine marchande bénéficient à leur tour d’un régime semblable. Cette extension ne doit rien au hasard : les navires de commerce sont un vivier de personnels dans laquelle la flotte militaire peut piocher le cas échéant.
Ensuite, ce système de pensions s’étend peu à peu aux représentants d’autres corporations, comme les employés des Fermes Générales en 1768 et les fonctionnaires de l’Etat en 1790. Tout au long du XIXème siècle, le régime de retraite essaime dans les manufactures, les administrations ou encore des organisations plus ciblées : pêle-mêle, la Banque de France (1806), la Comédie Française (1812), les Chemins de fer (1853) ou encore les Mines (1894). Est-ce à dire qu’une fibre sociale s’empare de tout le pays ? Les historiens insistent volontiers sur l’idéologie paternaliste des patrons, qui ne trouvent pas mieux que les pensions pour recruter puis fidéliser leurs troupes.
L’idée d’un régime général pour tous les salariés début au XXe siècle
Dans ces conditions, il faut attendre le début du XXème siècle pour voir émerger l’idée d’un régime général pour tous les salariés. La loi du 5 avril 1910 porte sur les fonts baptismaux les Retraites ouvrières et paysannes, un système qui emprunte beaucoup au dispositif allemand approuvé par Bismarck et largement appuyé sur la cogestion entre employeurs et employés. Les premiers pas sont d’autant plus timides que les règles ne sont pas contraignantes. On patientera ainsi jusqu’en 1930 pour voir l’implantation du premier régime d’assurance vieillesse obligatoire – applicable à toutes les personnes qui gagnent moins de 15 000 francs (de l’époque) par an. Un pas important étant entendu que la gestion de ce système (conçu sur le double mode de la répartition et de la capitalisation) relève de différents établissements (caisses syndicales, organismes patronaux, mutuelles…).
A l’orée des années 1930, les retraites deviennent aussi une problématique partagée à l’échelle internationale, à l’image du Bureau internationale qui, en 1933, recommande que le système soit financé conjointement par l’Etat, les entreprises et les salariés. En France, juste après la Seconde guerre mondiale, le Plan français de protection sociale est consacré pour une bonne part aux retraites et aux questions de solidarité entre les générations. En 1945, une ordonnance fixe à 65 ans l’âge du départ en retraite. Depuis, les réformes n’ont jamais vraiment cessé…
Frédéric de Monicault