Le loup, éternel objet de polémiques

L’animal aurait fait son retour en Corrèze, au grand dam des éleveurs. Depuis toujours, l’animal n’a pas bonne presse.

Visuel : Peinture pariétale polychrome d’un loup gris de la grotte de Font-de-Gaume en France. Visuel Wikimedia Commons

Les polémiques ne s’apaisent pas au sujet du loup. A la fin de l’année dernière, ce sont plusieurs brebis qui ont été égorgées dans le Var, dans l’enceinte même d’une bergerie. En février, des éleveurs ont interpellé les pouvoirs publics sur le retour de l’animal en Corrèze : des traces ont été identifiées et les agriculteurs veulent, le cas échéant, que les systèmes d’indemnisation puissent s’appliquer dans les meilleurs délais. Dans l’intervalle, la sortie du film Marche avec les loups a été sévèrement attaquée par la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) : celle-ci a appelé à une mobilisation générale contre ce documentaire avant de faire machine arrière.

Plus de 500 loups dans l'hexagone aujourd'hui

Aujourd’hui, plus de 500 loups sont recensés dans l’Hexagone. Indépendamment de ces menaces pour les élevages, depuis quand date cette peur du loup ? Pour une fois, les historiens campent sur une position unique : le phénomène remonte au Moyen Age quand les guerres, les famines et les épidémies sèment des cadavres, dépecés par toute une variété d’animaux – les loups mais aussi les renards, les corbeaux et les rapaces. Au même moment, l’Eglise s’empare de l’image du loup pour désigner les forces maléfiques. Quand les comédiens jouent les Mystères, ces pièces données au pied des cathédrales, celui qui incarne le diable est souvent vêtu d’une peau de loup. Le temps est loin où, chez les Celtes et les Gaulois, le loup est admiré pour sa ruse, sa force et sa puissance. D’où parfois ces têtes de loup sur les casques des guerriers. Quant à l’empire romain, il s’est bâti sur la légende de Romulus et Remus, deux jumeaux élevés par une louve (qui est toujours l’emblème de la ville de Rome).

L’affaire de la bête du Gévaudan

Sous l’Ancien Régime, la peur du loup ressurgit de manière paroxystique à travers l’affaire de la Bête du Gévaudan. Le contexte est glaçant : à partir de 1764 et pendant quatre ans, plusieurs personnes, souvent des enfants ou des jeunes gens, périssent déchiquetés. Qui les attaque ainsi en Languedoc et en Auvergne ? Des troupes sont envoyées, des battues organisées et en septembre 1765, un grand loup est tué. Peine perdue : les attaques reprennent jusqu’en 1767, date à laquelle un nouvel animal, une «Bête» disent les contemporains, est abattu. Fin des meurtres et accalmie pour le pouvoir royal, lui aussi secoué par cette histoire, mais la légende est en marche : au fil des époques, les thèses s’accumulent, mettant en scène un loup, une hyène, une espèce hybride ou encore un fou criminel, bardé d’outils monstrueux. Circule même le scénario d’une vengeance divine.

Le loup disparu en France à la veille de la Grande Guerre

Au XIXème siècle, sous l’impulsion des éleveurs, la chasse au loup s’intensifie. Il s’agit d’éradiquer la menace qui pèse sur les troupeaux. Protéger l’homme aussi, car l’animal est susceptible de porter la rage. Les autorités accompagnent le phénomène d’extinction : un système de primes, souvent généreuses, est mis en place. En 1882, il y a même une loi pour renforcer le dispositif. Aux alentours de la Première Guerre mondiale, l’espèce aurait quasiment disparu en France. Son retour dans les Alpes intervient quelques décennies plus tard. Aujourd’hui, les défenseurs de l’environnement rappellent que le loup a toute sa place dans l’écosystème. Leurs contradicteurs restent mobilisés.

Frédéric de Monicault

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