La rentrée sociale, histoire d’un marqueur politique

Après l’été, le gouvernement doit plonger dans l’arène. Depuis un demi-siècle, la séquence est toujours délicate.

Visuel : ©AFP/Thomas Samson

La rentrée sociale. Le calendrier politique a désormais parfaitement intégré cet épisode qui sonne la fin de la pause estivale, avec la nécessité pour les pouvoirs publics de (re)mettre sur la table des dossiers problématiques dont la plupart nécessitent l’intervention des organisations syndicales. On en parle surtout depuis le milieu des années 1970, date à laquelle la France plonge dans la crise économique pour ne plus en sortir durablement. En septembre 1974, Valéry Giscard d’Estaing a été élu président de la République quelques mois plus tôt. L’état de grâce ne dure pas très longtemps : la France se ressent de plus en plus sévèrement du premier choc pétrolier survenu en octobre 1973. A l’époque, l’Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep) décide d’une brutale accélération des prix du baril. Parmi les explications, le cartel avance une riposte au soutien des pays occidentaux à Israël. Mais l’Organisation réfléchit aussi depuis longtemps à doper ses recettes pétrolières. Après quelques semaines, le baril se stabilise autour de 12 dollars, soit quatre fois plus qu’avant le début du séisme.    

En 1974, la rentrée sociale en France se traduit par une avancée significative puisque l’allocation de rentrée scolaire est versée pour la première fois. Elle a été portée sur les fonts baptismaux par la loi du 16 juillet 1974. Elle doit permettre de couvrir une partie des frais de la rentrée scolaire, pour les enfants et adolescents âgés de 6 à 16 ans. Les conditions de cette mesure seront ensuite étendues. Aujourd’hui, ce sont plus de 3 millions de familles qui perçoivent cette allocation. 

1981. Première rentrée sociale du pouvoir socialiste

En 1981, le pouvoir socialiste effectue sa première rentrée sociale. Pendant l’été, le gouvernement de Pierre Mauroy a prolongé l’euphorie ambiante avec un certain nombre de décisions fortes : embauche de plusieurs milliers de fonctionnaires, généralisation des 39 heures, augmentation du smic, instauration de la cinquième semaine de congés payés… L’arrivée à l’Élysée de François Mitterrand se fait avec cette promesse de «vouloir changer la vie». Mais l’automne est moins guilleret : les déficits publics s’accentuent fortement et Jacques Delors, alors ministre des Finances, réclame une pause dans les réformes. Il ne sera pas entendu tout de suite mais le spectre des rentrées difficiles s’est vite imposé à la nouvelle équipe en place.

La pression sur la rentrée sociale depuis bientôt un demi-siècle ne signifie que les années précédentes étaient systématiquement plus faciles. En 1968, quelques mois après les événements de mai, la conférence de presse de rentrée du général de Gaulle ne fait pas dans la mesure : le chef de l’Etat stigmatise tour à tour les journalistes, les intellectuels et les syndicalistes, sur toile d’un fond d’un peuple qui réclame «des institutions particulières comme antidote nécessaire à sa propre fragilité». Ce qui n’empêche pas que la Sorbonne a ré-ouvert dans le calme et que la nouvelle année universitaire s’écoulera paisiblement.   
Frédéric de Monicault

Newsletter subscription form block

Inscrivez-vous à notre newsletter