Depuis la Grande Peste, les masques protègent

Se protéger le nez et la bouche : l’humanité n’a pas attendu le Covid-19 pour s’équiper.

Des masques, vite. Le président de la République Emmanuel Macron a prévenu. Après le 11 mai, date à laquelle un dé-confinement progressif doit commencer, les Français devront se déplacer – systématiquement – avec un masque couvrant le nez et la bouche. D’ici là, outre les importations, plusieurs usines de fabrication en France vont tourner à plein régime. Quant au fait que les stocks aient pu fondre aussi vite sans être reconstitués, la polémique n’a pas fini de s’éteindre dans l’Hexagone. Quant à savoir combien de temps la population utilisera ce rempart contre le coronavirus, les experts répètent volontiers comme dans le sketch « un certain temps ».      

En France, l’histoire des masques de protection s’enracine au XIXème siècle. Dans le milieu hospitalier, après les travaux de Pasteur sur les microbes, médecins et infirmiers cherchent de plus en plus à protéger. Un autre chercheur contemporain du Français, l’Allemand Carl Pflüge, démontre pour sa part que l’acte aussi usuel de parler peut propager des microbes, via l’envoi de micro gouttelettes. Dans la foulée, le chirurgien polonais Jan Mikulicz-Radecki conçoit les premiers masques chirurgicaux, à base d’un coton très léger. Mikulicz-Radeck (1850-1905) est aussi un pionnier pour l’utilisation de gants pendant les opérations chirurgicales.

L’ingénieur Charles-Urbain Bricogne, inventeur d’un masque contre les poussières  

A la fin du XIXème siècle, la médecine n’a pas le monopole de ce type de protection. Dans l’industrie, Charles-Urbain Bricogne, l’un des principaux dirigeants de la Compagnie des chemins de fer du Nord, est l’auteur de plusieurs inventions, dont un masque contre les poussières nocives. Ingénieur principal du matériel, il entend protéger les ouvriers qui travaillent sur les voies mais aussi certains employés dans les gares. Dans l’armée, le masque devient systématique pour les occupants des premiers chars d’assaut ; il s’agit de se prémunir contre les éclats de peinture et de métal causés par le choc des projectiles.

Sur le champ de bataille, un cran supplémentaire est franchi pendant la Première Guerre mondiale. Après l’utilisation du gaz par les Allemands à Ypres (Belgique) en 1915, l’état-major français commande des baillons, des compresses et des tampons ainsi qu’une série de masques successifs, de mieux en mieux renforcés. Ainsi protégés, les soldats peuvent faire peur au reste de la population, tant ils sont appareillés de façon impressionnante pour l’époque.

Mais n’est-ce pas le cas déjà au XVIIème siècle, quand les médecins doivent affronter la peste. Charles de l’Orme, premier médecin de trois rois de France (Henri IV, Louis XIII et Louis XIV) imagine un vêtement pour protéger ses confrères de la tête aux pieds. Il y a grand manteau, recouvert de suif (de la graisse animale, censée faire barrage à la maladie), un chapeau et donc un masque. Celui est en forme de tête d’oiseau, avec un long bec. A l’époque, les gens croient – à tort – que la peste est propagée par les oiseaux. Le bec du masque sert aux médecins à le garnir de substances, fumigènes ou pas. Avec la conviction que les herbes, l’ambre ou l’encens protègent de la contamination : erreur là encore. Toutefois, quelle époque peut se targuer d’échapper aux approximations scientifiques ? La pandémie actuelle en apporte une nouvelle fois la preuve. 
Frédéric de Monicault

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