Ces rentrées scolaires dans le « monde d’après »

Après un événement majeur, comment se passe le retour à l’école ? Plongée dans le passé.

Visuel via Wikimedia Commons : école primaire supérieure de garçons à Brignoles, Var, au début du XXe siècle.

Dans un horizon de temps immédiat, la rentrée scolaire. Celle-ci est d’autant plus attendue qu’après la fin du confinement général – juste avant l’été - les élèves ont réintégré leur classe pour un laps de temps très bref. Quand ils ont pu la réintégrer. Au cours des prochaines semaines, les enseignants savent donc qu’il va falloir combler les manques accumulés pendant des mois. Par ailleurs, tout le monde se demande comment parvenir à respecter un minimum de distanciation sociale. Bref, cette rentrée 2020-2021 n’est pas comme les autres, comme toutes celles qui suivent les grands bouleversements, que ce soit au sortir de la Seconde Guerre mondiale en 1944-1945,  après l’irruption de la Ve République en 1958 ou après mai 1968 – après la révolution étudiante.

Il faudra attendre septembre 1945 pour assister à une véritable rentrée scolaire

Ainsi en 1944-1945, la France se relève à peine d’une période pendant laquelle plusieurs milliers d’établissements scolaires ont été soit rasés par les bombes soit partiellement détruits. Une bonne partie des élèves manque donc la rentrée en 1944, d’autant plus que les troupes allemandes n’ont pas encore été totalement repoussées.  Partout dans le pays, il faudra attendre septembre 1945 pour assister à une véritable rentrée scolaire, où tous les élèves répondent à l’appel. Les conditions sont précaires : le matériel, à commencer par les tables et les chaises, fait souvent défaut. Sans compter les problèmes de chauffage et les problèmes de santé tout court : la malnutrition affecte quantité d’enfants, dont beaucoup sont devenus chétifs en comparaison des élèves d’avant-guerre. Les cantines se débrouillent comme elles peuvent pour être approvisionnées régulièrement. En 1945, le ministère de l’Education se dote d’une Direction médicale de l’hygiène scolaire et universitaire. Les rentrées qui suivent la Seconde Guerre mondiale répondent à des enjeux sanitaires au moins autant qu’à des enjeux d’apprentissage académique.

Rentrée 1958 : 50 000 enfants supplémentaires

En 1958, la rentrée scolaire coïncide avec le vote de la Constitution de la Ve République. La principale nouveauté de cette rentrée intervient dans les écoles maternelles, avec 50 000 enfants supplémentaires par rapport à l’année précédente. Cette envolée tient au fait qu’un nombre croissant de femmes travaillent et qu’envoyer ses enfants à l’école coûte beaucoup moins cher que les faire garder. Davantage qu’en 1958, la vraie rupture se produit à la rentrée 1959, un an exactement après le changement d’ère politique. Dans l’intervalle, le nouveau régime a acté plusieurs modifications : l’augmentation de l’âge de la scolarité obligatoire (jusqu’à 16 ans contre 14 ans auparavant), le changement de formule du baccalauréat (de nouvelles disciplines font leur apparition) ou encore la mise en place de trois trimestres équilibrés.

La rentrée de 1968 tient compte des secousses du mois de mai

En 1968, la première rentrée scolaire qui suit la révolution étudiante et les événements du printemps se déroule fin septembre. C’est plus tard qu’aujourd’hui mais dans de nombreuses régions, pendant l’été, les enfants participent encore aux travaux des champs aux côtés de leurs parents. D’où un calendrier décalé. La rentrée scolaire en 1968 tient compte des secousses du mois de mai : à preuve, le port de la blouse devient moins systématique ; auparavant, même dans le secondaire, l’uniforme était la règle. Cette année, la rentrée se distingue aussi par une mixité accrue des classes. Tout au long de la décennie qui suit mai 1968, le ministère de l’Education nationale va généraliser le recrutement des jeunes enseignants. Certains, dans le monde de l’enseignement, peuvent se targuer d’avoir anticipé ces mutations ? En mars 1968, deux mois avant l’embrasement social, le recteur de l’académie d’Amiens conclue ainsi un colloque : « Le seul moyen d’éviter les révolutions, c’est d’en faire. » Prémonitoire.
Frédéric de Monicault

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