Ces footballeurs qui marquent l’Histoire
L’engouement autour du transfert de Messi à Paris rappelle combien les stars du ballon rond aimantent les passions, quitte à dépasser la dimension sportive.
Visuel Wikimedia commons : Maradona et Pelé en 1979
L’attaquant argentin Leo Messi, auteur d’un but mardi contre Manchester City, est bien parti cette saison pour faire les beaux jours du Paris-Saint-Germain. Son transfert cet été en provenance du FC Barcelone, en plus d’une nouvelle preuve éclatante du foot business, est venu rappeler que les stars du ballon rond sont plus que des athlètes hors normes : des personnalités à part entière de l’actualité. Il suffit de constater aujourd’hui l’engouement sur les réseaux sociaux. Mais il n’y a là rien de nouveau : le passé, proche ou éloigné, a déjà montré que ce sont des figures capables de laisser une empreinte dans l’Histoire.
Avant Messi, son prestigieux compatriote, Diego Maradona, disparu l’année dernière, a tout simplement redonné sa fierté au peuple argentin. Nous sommes en 1986, lors de la Coupe du monde au Mexique. En quart de finale, la sélection sud-américaine rencontre l’Angleterre, sur fond d’un antagonisme très fort entre les deux pays après la guerre des Malouines. Ce jour-là au stade Azteca de Mexico, l’Argentine l’emporte mais surtout Maradona marque le but décisif en s’aidant de la main. Peu importe que le geste, non vu par l’arbitre, soit contraire aux lois du jeu, le génial numéro 10 revendique haut et fort son acte en disant qu’il s’agit de la « main de Dieu ». A son décès en 2020, c’est un pays tout entier qui rend un dernier hommage à celui qui était surnommé « El Pibe de Oro » (le gamin en or).
Lors de la Coupe du monde 1978 organisée sur son sol, l’Argentine s’est découvert un autre héros : Mario Kempes est un fameux buteur qui ravit à la fois les foules et la dictature militaire en place. Lors de la finale remportée à Buenos Aires face aux Pays-Bas, le général Videla n’est pas le dernier à applaudir. Arrivée au pouvoir en 1976, la junte tombera finalement devant la démocratie en 1983. Avant ce Mondial argentin, l’équipe de France n’avait pas été qualifiée pour une phase finale depuis la Coupe du monde en Angleterre en 1966. Or plusieurs intellectuels avaient tenté de convaincre les Bleus de boycotter l’épreuve, arguant de la féroce répression de l’opposition et de l’utilisation de la torture en Argentine. Ils ne seront pas entendus.
Gerd Muller, Fritz Walter et le roi Pelé
En Allemagne, Gerd Muller est une autre légende qui vient de mourir. Cet avant-centre qui a fait toute sa carrière au Bayern Munich, est associé à un match qui reste comme une joute au moins autant géopolitique que sportive. Le décor est celui de la Coupe du monde 1974 en Allemagne. Le tirage au sort fait que l’Allemagne de l’Ouest va rencontrer l’Allemagne de l’Est lors du premier tour. Le jour J, la tension est à son comble. Sur fond de guerre froide, les dirigeants est-allemands ont signifié à leurs joueurs quelle importance prenait ce match : il s’agit de manifester la suprématie du bloc de l’est face sur une puissance capitaliste. La RFA de Gerd Muller est favorite mais c’est la RDA qui l’emporte sur la plus courte des marges. Hélas pour cette dernière, elle sera éliminée tandis que l’Allemagne de l’ouest ira jusqu’au bout de la compétition, victorieuse des Pays-Bas grâce notamment à un but de Gerd Muller.
Vingt ans auparavant, un autre footballeur allemand est entré dans l’histoire. Fritz Walter est le capitaine de la Mannschaft (le surnom de l’équipe d’Allemagne) qui remporte la Coupe du monde 1954 contre la Hongrie. Si le succès a autant de retentissement, c’est parce qu’il permet à l’Allemagne, neuf ans après la capitulation, de faire parler du pays de manière positive et de retrouver une part de fierté.
Dans ce concert des footballeurs amarrés à l’Histoire, comment oublier le roi Pelé ? Sa première Coupe du monde, il y participe en 1958 en Suède. Titré si jeune, Pelé n’empile pas seulement les records. Il incarne aussi le rêve de millions de gamins issus des couches les plus pauvres. Le chanteur brésilien bien connu, Gilberto Gil, qui fût aussi ministre de la Culture entre 2003 et 2008, a cette phrase pour résumer la trajectoire du champion : « Pelé arrive lorsque la télévision fait son apparition. Il va participer à l’émancipation brésilienne et notamment de jeunes des favelas qui voient en lui une image populaire de l’ascension sociale d’un Noir issu des quartiers défavorisés. »
Et les footballeurs français dans tout ça ? Y en a-t-il qui ont franchi les frontières du rectangle vert pour s’imposer durablement dans l’imaginaire collectif. Zinedine Zidane fait partie de ceux-là : en 1998, il est un artisan prépondérant du premier Mondial remporté par les Tricolores. A la suite de cette victoire, le concept « black-blanc-beur » est porté au pinacle, dans le sillage d’une équipe métissée qui s’est montrée à la fois unie, valeureuse et talentueuse. En 2006, la France est à nouveau en finale du Mondial mais elle doit s’incliner contre l’Italie. Cette fois, la performance de Zidane pâtit de son expulsion contre les Transalpins. Mais le joueur a tellement fait au cours de sa carrière pour l’équipe de France que sa cote de popularité ne faiblit pas.
Frédéric de Monicault