
Ces comiques qui se hissent en politique
Après l’accession à la présidence ukrainienne de l’humoriste Volodymyr Zelensky, retour sur le rire au pouvoir.
Connaissez-vous Volodymyr Zelensky ? A dire vrai, voici encore quelques semaines, peu d’experts internationaux étaient encore en mesure de mettre un visage sur le nouveau président ukrainien, humoriste de son état. Alors que l’intéressé, qui fait actuellement ses premiers pas au pouvoir, peut se targuer d’avoir recueilli plus de 70% des suffrages, les commentaires vont bon train sur les personnalités comiques ayant accédé un jour aux plus hautes fonctions. Dans un passé proche, le nom de Jimmy Morales revient aussitôt. Elu président du Guatemala à l’automne 2015, ce clown de profession brillait surtout jusque-là par son show à la télévision, «Moralejas» («moralités»), aux blagues pas toujours très recherchées.
Beppe Grillo en Italie
En Europe, une autre personnalité a émergé dans cette même veine : l’acteur et humoriste italien Beppe Grillo s’est fait le chantre de la démocratie directe et des initiatives locales. Ce sont moins ses émissions sur le petit écran que ses assertions sur son blog qui ont dopé sa popularité. Parmi ses thématiques récurrentes, Grillo traite volontiers de la limitation des flux migratoires, de la baisse des impôts et du refus de la malbouffe. Son Mouvement 5 étoiles s’est forgé une place de choix en moins d’une décennie, avec notamment plusieurs dizaines de représentants élus en 2013 au Sénat et à la Chambre des députés.
Les bouffons au pouvoir
Zelensky, Morales, Grillo… Il n’en faut pas plus pour saluer les «bouffons» au pouvoir. Le terme est péjoratif, mais beaucoup moins quand on se replonge dans l’Histoire, car le bouffon exerce une véritable influence du XIIIème au XVIème siècle. Le fou du roi dispose en effet d’une incomparable liberté de ton par rapport à ceux qui entourent le monarque. Il peut dire les pires vérités, sous couvert d’amuser la galerie, et ses piques visent aussi son maître. Le premier «fol» qui marque les esprits est Geoffroy, à la cour de Philippe V (1291-1322), le souverain qui institutionnalise cette fonction d’amuseur. Le bouffon le plus connu, Nicolas Ferrial, est resté dans les mémoires sous le patronyme de Triboulet. Il sert d’abord Louis XII puis François Ier, qui crée une école de fou. Henri III aura une bouffonne, Mathurine, mais c’est surtout son bouffon, Jean-Antoine d’Anglerais, dit Chicot, qui pousse loin l’étendue de la fonction. Habile les armes à la main, c’est un conseiller écouté du roi. Plus tard, on retrouvera Chicot aux côtés d’Henri, auquel il aurait fortement recommandé de se convertir à la religion catholique. Le personnage a été popularisé par Alexandre Dumas dans «La Dame de Monsoreau».
Frédéric de Monicault