A l'épreuve des faits
Dans le climat d'espionnite franco-allemande des années post-1870, le procès d'un capitaine d'artillerie pour crime de haute trahison n'a rien d'étonnant. Ce qui l'est davantage, c'est l'acharnement de l'état-major à vouloir accuser Alfred Dreyfus sur la base d'un dossier... vide !
Depuis le désastre de 1870, les relations franco-allemandes demeurent tendues. La France n'a pas admis les conséquences de sa défaite, ni la perte de l'Alsace-Lorraine. Toute une génération de jeunes Français grandit dans le culte de la revanche à venir et le respect envers l'armée. Une nouvelle guerre est, à plus ou moins brève échéance, inévitable. Des deux côtés du Rhin, on la prépare activement. Et l'on recourt d'abondance à l'espionnage afin de se tenir au courant des dernières innovations militaires de l'ennemi. Tout cela, au fond, est parfaitement normal, méme si, de part et d'autre, on répugne à le reconnaître, partant du préjugé que le renseignement, pour nécessaire qu'il soit, n'est pas une activité avouable.